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Daniel PERON peintures semeur

La mort du sacré ?

Pour plus de facilité, mettons de côté le sacré au sens de important... Il est évident qu'au plan individuel comme au plan collectif, tout ce qui m'est cher (un être, un objet, un lieu attaché à un souvenir) est dit «sacré»…

Jetons plutôt un coup d'oeil sur la notion de «sacré» en tant que relation à ce qui nous dépasse et qui nous parle autrement, sur la plan symbolique, faute de pouvoir nous parler d'une manière effective. Le sacré en tant que vecteur de l'Indicible…

 

Je me suis beaucoup intéressé à Mircéa Eliade en général et au livre de Roger Caillois «L'homme et le sacré» entre autres.

Mircea Eliade: «L'occidental moderne éprouve un certain malaise devant certaines formes de manifestations du sacré : il lui est difficile d'accepter que, pour certains êtres humains, le sacré puisse se manifester dans des pierres ou dans des arbres. Or, il ne s'agit pas d'une vénération de la pierre ou de l'arbre en eux-mêmes. Les arbres sacrés ne sont pas adorés en tant que tels ; ils ne le sont justement que parce qu'ils sont des hiérophanies, parce qu'ils "montrent" quelque chose qui n'est ni pierre ni arbre, mais le sacré».

On rejoint ici toutes les préoccupations du moment sur le «désenchantement du monde». Le monde désenchanté est peut-être un monde où cette perception du sacré a disparu, du moins dans nos sociétés occidentalisées. Ainsi certains verront dans la terre qu'ils foulent ou le ciel qui les surplombe, simplement de la terre ou un ciel ensoleillé prometteur de coups de soleil à la plage ou bien encore un assemblage de gaz variés. D'autres y verront plus que cela ou même n'y verront pas cela du tout, ils y verront autre chose... Pour être plus exact, ils y pressentiront autre chose...

 

«Le Monde n'est pas un Chaos mais un Cosmos. Le Ciel révèle directement, "naturellement", la distance infinie, la transcendance du dieu. La Terre, elle aussi est transparente: elle se présente comme mère et nourricière universelle. Les rythmes cosmiques manifestent l'ordre, l'harmonie, la permanence, la fécondité. Dans son ensemble, le Cosmos est à la fois un organisme réel, vivant et sacré: il découvre à la fois les modalités de l'Etre et de la sacralité.»

 

Ainsi, qu'on cherche à la comprendre par la science, à l'expliquer par le mythe ou une révélation, qu'on l'explore en profondeur ou dans l'espace, la Nature, par ce qu'elle est, par essence, se donne déjà à voir comme Transcendance, naturellement... Même en ce début du 21ème siècle, si nous avons presque épuisé ses ressources naturelles, n'avons pas encore épuisé, loin s'en faut, sa part de mystère et d'inconnu...Il suffit de l'observer, de s'en imprégner pour immédiatement être face au Mystère… Nous avons, en partie, perdu cette faculté et nous en souffrons. Nous cherchons à la compenser par la Raison techno-scientifique triomphante, par la Foi religieuse en des dogmes confortables, par des dérives vers la magie, l'astrologie, les drogues, la quête matérialiste, etc.

Rappelons-nousfilm savoureux "Les Dieux nous sont tombés sur la tête" de Jamie Uys. Même quand un objet de consommation, la bouteille de coca, fait irruption dans le monde enchanté des Bushmen, elle est immédiatement investie d'une aura divine. Cadeau empoisonné d'ailleurs qui sèmera la discorde... Le Sacré imprègne la pensée primitive, sert de filtre d'interprétation entre l'homme et le monde visible ou invisible... Il ne s'agit pas de revenir à cela évidemment. Mais sommes-nous si sûrs de pouvoir nous en dispenser totalement ? D'ailleurs, notre Bushmen n'était peut-être pas très loin de la vérité. Le Dieu Coca cola n’a-t-il pas ses adorateurs de par le monde ?.. :)

 

Caillois "Le sacré est ce qui donne la vie et ce qui la ravit".

Tout est là, le sacré est dans le mystère de nos origines, nos doutes sur nos fins dernières, la présence du vivant et de la mort, du tréfonds de nos cellules aux confins de l'univers, et le Mystère du Pourquoi et du Comment ... Cette sensation d'un Absolu qui nous dépasse certainement, nous pouvons en faire l' expérience dans notre vie quotidienne lorsque, pendant un instant, on est comme abstrait de ce quotidien, le temps d'un"contact" fugitif avec le Sacré... Sensation fuyante d'un Sacré indicible et inaccessible et qui pourtant se manifeste, à travers les force naturelles, la beauté d'un paysage, l'intensité d'un évènement, la perception de quelque chose de diffus, confus.

Nous sommes à la fois emplis d'admiration et au bord d'un malaise, d'une angoisse. Il suffit de fondre son regard dans un ciel nocturne estival pour en ressentir les effets. C'est la force de notre Imaginaire, notre capacité à produire du symbole qui nous fait pressentir «autre chose» . La pensée symbolique nous est essentielle. Sans elle, pas d'art, pas de langage, pas de poésie, pas de publicité même, etc . et pas de sacralité. C'est pour cela, je crois, que le Sacré, indicible par essence, a besoin de gestes, de paroles, de chants, de symboles pour être appréhendé, capté et, en quelque sorte, piégé par les rituels qui permettent de le renouveler, de l'alimenter en permanence. De garder le contact. Rituels religieux bien sûr mais aussi rituels politiques ou sociologiques (commémorations, symbolique du drapeau, etc.)

Ce respect mêlé de peur, cette admiration qui peut confiner à l'effroi font du Sacré quelque chose de profondément ambivalent… Approcher le sacré peut se révéler bénéfique ou profondément négatif. D'où la notion de tabou associé au sacré, de transgression...et de châtiments possibles.

 

On peut encore parler longtemps sur le sacré. C'est un champ de réflexion d'autant plus passionnant qu'il opère en bordure de la raison et de l'imaginaire, quelque part où se situe peut-être ce qu'on appelle le spirituel... Disons que c'est une dimension de la relation au monde que nous avons cherché à occulter au nom du progrès et de la science. Comme si la pensée rationnelle ne pouvait cohabiter avec aucuneforme de pensée. La pensée symbolique devenant le refuge des croyants, des artistes, de l'enfance ou du fantasque… Réenchanter le monde c'est peut-être essayer de retrouver ce lien et de l'adapter à notre vision contemporaine…

Chaque découverte scientifique perce le voile du Mystère pour s'ouvrir...sur le Mystère à nouveau. La quête du Spirituel ne doit pas être réservée à des spécialistes et circonscrites à des domaines précis. Elle est dans le questionnement du monde et de soi, la possibilité de l'Emerveillement encore et toujours, et particulièrement là où, dans sa Quête, le chercheuremmène,au-delà des systèmes solaires ou au plus profond de nos cellules, à nos origines les plus lointaines ou vers nos rêves les plus utopiques...Le chercheur, le scientifique d'aujourd'hui, n'est-il pas constamment sur le front de l'Inconnu, en quête de sens, en quête de vérités, en quête d'un Graal qui s'éloigne sans cesse au fur et à mesure qu'on s'en approche ?...

Je pense à Bachelard et à ses rêveries sur le feu, à celui qui sut emmener la poésie faire un bout de chemin au carrefour du matérialisme, de l'empirisme et de l'idéalisme...

 

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